Mieux connaitre les virus de la vigne pour améliorer le contrôle de la qualité sanitaire des plants de vignes dans le cadre du processus de prémultiplication et de diffusion est l’un des enjeux des activités du LPA VitiVirobiome de Colmar (Alsace). Ce dernier contribue également à une meilleure réactivité et une meilleure anticipation vis-à-vis des maladies/virus émergents. Le point sur l’une des techniques clé associées à cette mission : les High Throughput Sequencing, ou HTS.
Qu’est-ce que les HTS?
Le terme HTS vient de l’anglais, High Throughput Sequencing, qui signifie Séquençage Haut-Débit.
Ces ‘nouvelles’ techniques de séquençage ont révolutionné l’étude des génomes avec l’obtention d’information génétique massive en comparaison à des techniques de séquençage dites de bas débit, connues sous la dénomination de séquençage SANGER.
Petite histoire, mais gros impact
Ces techniques HTS ont vu le jour grâce au Projet ‘Genome Humain’ (https://www.genome.gov/human-genome-project) lancé en 1990. Ce projet avait pour but de générer la première séquence du génome Humain, obtenue en 2003, afin d’accélérer les connaissances et les études sur la biologie de l’être Humain et la médecine. Les HTS ont drastiquement avancé la date d’achèvement du séquençage du génome humain de plus de 20 ans si le séquençage bas-débit avait été utilisé afin de générer ce fameux génome. Depuis, les HTS se sont très largement diffusées dans tous les domaines de la biologie. Un grand nombre de laboratoires à travers le monde utilise ces techniques afin d’obtenir des informations sur le vivant provenant d’environnements bien différents (microbiote humain, métagénomique des fonds marins…). Dernièrement, avec l’utilisation massive des HTS, des améliorations technologiques du matériel et de la chimie, les coûts de séquençage HTS ont drastiquement diminué, permettant leur appropriation et leur utilisation en santé des plantes, et de la vigne en particulier.
Les HTS et la vigne
Comme pour l’être humain, ou tout autre organisme, les HTS peuvent être et sont utilisées pour séquencer et connaitre le génome de la vigne. C’est en 2007 que le génome de la vigne a été séquencé. Depuis, des informations sur le génome de près de 3500 vignes cultivées et sauvages ont été obtenues (https://www.science.org/doi/10.1126/science.add8655). Cette étude a d’ailleurs permis d’émettre des hypothèses sur l’origine de la vigne et sur sa domestication. Une autre application des HTS est l’analyse du ‘transcriptome’, c’est-à-dire l’analyse de l’expression du génome de la vigne (ensemble des ARN issu de la transcription du génome, encore appelés ‘transcripts’). Ces études permettent de déterminer quels gènes sont exprimés dans différentes conditions expérimentales et/ou dans un tissu ou type cellulaire spécifique. Une dernière utilisation possible des HTS peut être comme méthode de détection des pathogènes sur vigne, et principalement les virus.
HTS : méthode ultime de détection des virus
A l’inverse des autres méthodes de détections, les HTS sont les seules à être considérées comme étant ‘sans apriori’. En effet, que ce soit pour l’indexage biologique (https://www.vignevin.com/article/detection-des-virus-par-la-methode-dindexage), les techniques immunologiques (test ELISA) ou encore les méthodes de biologie moléculaire basées sur l’amplification du génome, par PCR et/ou RT-PCR, il faut au départ connaitre ce que l’on recherche, c’est-à-dire partir avec un ‘apriori’. De plus, pour chaque virus que l’on souhaite rechercher, il faut mettre en place une analyse. Ce n’est pas le cas des HTS, qui en théorie, ont la capacité de détecter tout acide nucléique (information génétique) au sein d’un échantillon, dépendant bien sûr de la méthode d’extraction et d’enrichissement choisie. Ceci est très important, sachant que la vigne héberge un grand nombre de virus et en général, de façon simultanée. Cet ensemble ou communauté virale au sein de la plante est ainsi dénommé ‘le virome’.

Figure 1 : l’apport des HTS dans la connaissance du virome de la vigne.
La virologie de la vigne intègre depuis plus d’une dizaine d’années ces méthodologies dans ses questions de recherche. C’est en 2010 que la première étude qui utilise les HTS dans l’identification de virus est publiée. Depuis, près de 50 nouvelles espèces virales ont été identifiées comme étant hébergées par la vigne. Ces virus présentent des génomes constitués d’ADN mais aussi d’ARN, double brin ou simple brin, avec des caractéristiques génétiques bien différentes (polyadénylés ou non). Seuls quelques virus parmi eux sont connus pour causer ou être associés à des syndromes graves de la vigne, et font d’ailleurs partie du schéma de certification. Cependant, pour la très grande majorité des virus appartenant à ce virome, leur impact sur la vigne est peu, voire pas connu, bien que certains virus émergents puissent être d’importance. C’est le cas du grapevine Pinot gris virus (GPGV) qui pose question (https://www.plan-deperissement-vigne.fr/outils/webtv/webinaire-etat-des-lieux-sur-le-gpgv-virose-emergente-replay), mais aussi le cas du Grapevine Redblotch virus (GRBV) responsable de la maladie du Redbloch, identifiée uniquement sur le continent américain pour le moment.
Quelle est la place des HTS à l’IFV ? Et qu’est-ce que le LPA VitiVirobiome ?
A l’heure actuelle, les HTS sont très largement intégrées dans les questions de recherche, mais elles ne le sont encore que très peu, voire pas, dans la filière viticole. Le 26 février 2023, au salon international de l’agriculture, l’IFV et INRAE ont signé la convention de création d’un laboratoire partenarial associé (LPA) : Vitivirobiome. Ce dispositif permet de mettre en commun les forces des deux instituts au service, dans un premier temps, de la recherche sur les virus de la vigne, mais devrait très rapidement répondre à des questions de terrain et se poursuivre sur de la prestation au service de la viticulture, la prestation déjà possible sur demande. Basé à Colmar, ce LPA vise à une amélioration des méthodes actuelles, que ce soit dans les domaines de la certification ou de la ‘qualité sanitaire’. A terme, ces techniques devraient venir en appui dans l’obtention de nouveaux hybrides, du suivi sanitaire des ‘têtes de clones’, de permettre une traçabilité de haute qualité pour la pépinière en général. Ces méthodes HTS commencent à être utilisées pour essayer de répondre à des problématiques de symptomatologies nouvelles. Cependant elles restent toujours pour le moment inféodées à des questions de recherches. A terme, elles pourraient permettre une meilleure connaissance et veille du statut sanitaire du vignoble français. Les HTS et les analyses qui en découlent pourront aussi peut-être un jour permettre d’avoir une certaine proactivité et anticipation de risque d’émergence possible et ce grâce au Dataming (https://www.plan-deperissement-vigne.fr/recherches/programmes-de-recherche/vitimining).
Contact : Jean-Michel Hily, IFV Colmar

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