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Principales causes du dépérissement de la vigne, les maladies du bois sont très dommageables pour la pérennité du vignoble. C’est dans le bois de la charpente des ceps que les champignons responsables des maladies du bois se concentrent. On peut soigner un cep atteint de maladie du bois selon plusieurs techniques préventives ou curatives. Curetage, recépage et regreffage consistent à remplacer le vieux tronc par un nouveau tronc sain. Quelles techniques choisir en fonction de son vignoble ? Explications.


1- Le recépage, technique préventive

Le recépage est une technique efficace utilisée de manière préventive, avant l’expression des symptômes. Il permet de régénérer le cep de vigne, en ralentissant la propagation de la maladie. Le recépage permet aussi d’améliorer le rendement.

Une opération simple.
Le recépage consiste à sélectionner un jeune pampre à la base du cep au printemps pour créer une nouvelle charpente au pied et ainsi supprimer l’ancien bois. Le but est de rajeunir les troncs pour éviter l’apparition des maladies du bois. Généralement, il est réalisé de manière ponctuelle dans la parcelle lors de l’observation de légers symptômes bien qu’il soit plus intéressant d’effectuer un recepage avant que le pied exprime les premiers symptômes car cela permet d’éviter une perte de récolte. En effet, le temps que le pampre forme un nouveau tronc et entre en production, le tronc d’origine peut être conservé et il continue à produire.

Deux techniques de recépage en fonction de la situation
Le recépage classique, réalisé sur une vigne en production à l’aide d’un pampre qui a poussé spontanément, ou le recépage forcé réalisé grâce à un pampre qui a poussé après la décapitation du vieux tronc.

La technique du recépage classique ou précoce vise à conserver les ceps en bonne santé et à rétablir les rendements avant la perte de récolte ainsi qu’à gérer les maladies du bois dans le vignoble à un stade précoce avant l’apparition des symptômes. Dans cette situation, le tronc d’origine est préservé et continue à produire en double tronc et peut même servir de tuteur au jeune pampre, jusqu’à ce qu’il forme un nouveau tronc productif.

Concernant le recépage forcé, dès l’apparition des premiers symptômes de maladies du bois, il est possible de décapiter les ceps de vigne malades en hiver et attendre la production de nouveaux pampres au printemps qui formeront un nouveau tronc sain qui portera les futures récoltes. Cela maintient le rendement et peut ralentir la propagation de la maladie en éliminant une source potentielle d’inoculum dans la parcelle.

Bon à savoir
Les nouveaux troncs peuvent être exempts de maladies du bois seulement si la décapitation a été réalisée en dessous des nécroses dues aux champignons pathogènes.

Point de vigilance
Le recépage est efficace contre l’eutypiose ou lorsqu’il est réalisé sur des formes lentes de l’esca, mais en cas d’apoplexie il est trop tard pour le mettre en œuvre.

 

Quel coût ?

Le recépage pour assainir ou prévenir les maladies du bois sera toujours inférieur au coût du remplacement du plant. Selon une étude du Bureau National Interprofessionnel du Cognac, le recépage se justifie si la durée de vie de la parcelle est d’au moins dix ans, si le prix du vin est supérieur à 0,8 € le litre et si le taux de réussite du recépage est supérieur à 20 %.
Lorsque le recépage fonctionne avec 60% de réussite (vignes symptomatiques devenues asymptomatiques), le coût du recépage est de 3 € HT pour un cep.

2- Le curetage, une technique nécessitant un apprentissage

Le curetage du tronc de vigne est une technique de plus en plus pratiquée pour limiter les effets des maladies du bois de la vigne. L’objectif du curetage est de creuser le tronc pour éliminer le bois endommagé par l’amadou (nécrose centrale blanche et spongieuse qui contient principalement des pathogènes de l’esca) pour préserver le bois fonctionnel et le flux de sève. Les zones malades sont souvent proches des parties de bois mort et sous des plaies de taille importantes.

Comment procéder ?
Il est nécessaire d’ouvrir le tronc (avec une petite tronçonneuse) en tronçonnant à l’endroit où du bois mort a été détecté. L’amadou ainsi visible doit être retiré, curé, en utilisant le côté de la lame de tronçonneuse. Cette étape doit être réalisée sans ronger le bois vivant, ni en touchant les flux de sève. Le curetage est une technique qui demande un apprentissage et une certaine expérience. Il est en effet nécessaire de bien gratter afin de supprimer tout le bois malade.

Quand réaliser le curetage ?
Le curetage peut être réalisé dès l’apparition des premiers symptômes entre juin et septembre. S’il est réalisé suffisamment tôt en juin, le curetage peut permettre de sauver la récolte de l’année en cours. Il peut également être réalisé en hiver, lors du repos végétatif de la vigne.

Efficacité du curetage

Le curetage est efficace sur des ceps qui présentent des symptômes de l’esca. Plus les symptômes sont légers plus il est efficace. Selon des études du Service Interprofessionnel de Conseil Agronomique, de Vinifications et d’Analyses du Centre (SICAVAC), le curetage montre de meilleurs résultats sur des vignes jeunes plutôt qu’âgées. De nombreuses expérimentations ont montré que les taux de réussite du curetage atteignent très régulièrement 90 % à 95 %.

Quel coût ?
Il faut en moyenne 5 minutes pour cureter un pied. Ce temps dépend surtout de l’âge de la vigne. Le coût moyen du curetage est estimé à 2,5 € HT par cep.

3- Le regreffage, peu couteux et plus rapide que la complantation

Le regreffage est une technique curative qui consiste à conserver la partie racinaire et regreffer directement sur le porte-greffe en place. Le regreffage ne doit être utilisé que lorsque la nécrose s’arrête au niveau de la soudure et ne descend pas dans le porte-greffe.
Le regreffage couramment pratiqué est un regreffage en fente. Il s’effectue quand la sève est en circulation mais pas trop active : printemps ou automne. Le regreffage en automne est plus aléatoire et ne montre pas d’aussi bons résultats qu’au printemps. L’opération consiste donc à enlever le pied de vigne du porte-greffe, tailler une fente dans ce dernier afin d’y insérer un nouveau greffon. Le cep regreffé pourra produire une pleine récolte dès 2 ans après le regreffage.

Bon à savoir
Le regreffage en fente nécessite moins de travail que d’autres techniques comme la greffe en Chip-Bud ou T-bud, il est aussi bien plus approprié pour la régénération des ceps atteints de maladies du bois.

Points de vigilance
Le choix et la préparation des greffons. Ils doivent être en parfait état : les bois doivent être secs et les bourgeons ne pas avoir débourré. Idéalement, ils doivent provenir d’une jeune vigne avec peu de vrilles et sans entre-cœurs.  Les greffons seront réhydratés 1 ou 2 jours avant le regreffage. Après
24 h les pieds dans l’eau, seuls les bourgeons qui commencent à gonfler seront conservés pour le regreffage. Les greffons doivent avoir des biseaux taillés bien droits pour faciliter leur mise en place dans la fente du porte greffe.

Quelle efficacité ?
Le taux de réussite pour le regreffage est en moyenne de 75 %. Le SICAVAC a également démontré que si le travail est bien réalisé, le taux de réussite peut être compris en 80 % et 90 %. Pour arriver au même niveau de rentabilité qu’une complantation, il suffit d’avoir 50 % de réussite au greffage en fente, en sachant qu’un bon greffeur peut regreffer une centaine de plants en une journée et que le temps des travaux pour regreffer est moins important que pour remplacer.

Quel coût ?

Le coût d’un regreffage est variable suivant la quantité de pieds à regreffer et peut varier de 2,97 € à 4,02 € HT par pied (contre 9,87 € pour un complant) selon des travaux réalisés par la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire et l’Association Technique Viticole du Maine et Loire.

Pour en savoir plus, consultez les fiches techniques du Plan National Dépérissement du Vignoble : www.plan-deperissement-vigne.fr/ 

Cet article est également paru dans le numéro de Février 2021 du magazine Réussir Vigne

 

Anastasia Rocque

Anastasia Rocque est chargée de mission Dépérissement à l’IFV