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L’azote en viticulture

Du fait de son rôle majeur dans le fonctionnement de la vigne et de ses effets importants sur la qualité des raisins, la gestion de l’azote est capitale dans la maîtrise quantitative et qualitative des raisins.

Pourquoi l’azote est-il aussi important ?

L’azote est l’un des constituants majeurs des plantes. Il joue un rôle primordial dans leur physiologie par l’intermédiaire des molécules dont il est l’un des composants : acides aminés (édification, métabolisme), acides nucléiques (génétique), chlorophylle (énergie), hormones de croissance (développement).

Quels sont les facteurs influençant la disponibilité en azote ?

  • le type de sol
  • aération, tassement, hydromorphie
  • teneur en matières organiques du sol
  • type de matière organique apportée
  • entretien du sol par l’enherbement (espèces, surface enherbée). Le travail du sol modifie la cinétique de la fourniture en azote
  • les conditions climatiques (température, pluviométrie)

Comment gérer l’azote ?

La fertilisation azotée doit être intégrée au raisonnement global de la fertilisation de la vigne, en relation avec l’entretien du sol. L’azote ayant un effet important sur la plante du point de vue qualitatif, il convient de trouver le juste équilibre entre développement optimal de la vigne et qualité des raisins. La spécificité de la gestion azotée vient également du fait qu’elle est à réfléchir annuellement, contrairement aux autres éléments principaux comme P et K. La gestion de l’azote est à raisonner en priorité par l’intermédiaire de la matière organique. L’apport d’autres formes azotées n’est à envisager que si la gestion de la matière organique est correcte et qu’une carence est diagnostiquée. Enfin, il convient de bien garder à l’esprit qu’une carence est toujours plus facile à corriger qu’un excès.

Quelles sont les 3 formes d’azote minéral ?

C’est essentiellement sous sa forme minérale que l’azote est absorbé par le système racinaire de la vigne. L’azote minéral est présent sous trois formes.

  • le nitrate NO3- qui est assimilé facilement par les plantes. Les nitrates sont très solubles car ils ont la même charge électrique que le complexe argilo-humique et ne sont pas retenus par le pouvoir absorbant du sol. Ils sont donc facilement lessivés et leur vitesse de migration en profondeur dépend de la pluviométrie et de la texture du sol. En général, 3 à 8 fois la hauteur de pluie (soit 3 à 8 cm pour 10 mm de pluie). Cette forme d’azote doit être apportée lorsque les besoins sont importants (à partir de la floraison)
  • l’azote ammoniacal qui est peu assimilé par les végétaux mais sert de nutriments aux micro-organismes du sol. Il est relativement retenu par le pouvoir absorbant du sol car chargé positivement. Il peut être nitrifié par les bactéries du sol plus ou moins rapidement selon les conditions
  • l’urée qui est utilisée en tant que fertilisant foliaire car elle est soluble et facilement absorbée par les feuilles

Quels sont les besoins de la vigne en azote ?

Les besoins de la vigne sont modestes et se situent en moyenne autour de 20-30 kg d’azote par hectare et par an pour une charge modérée en raisins de cuve. Dans le cas d’un objectif à plus forte production (vin de table ou de pays, eaux de vie), ces besoins peuvent être doublés. Ils peuvent être satisfaits, tout au moins en partie, par l’azote fourni par la minéralisation de la matière organique du sol. C’est la principale source d’alimentation pour la plante. Cette minéralisation dépend des conditions climatiques (température et humidité) et du type de sol (taux d’argile, pH…). Les besoins de la plante en azote augmentent à la floraison pour atteindre un pic au stade petits pois et à la véraison. Du débourrement au début de floraison, l’azote nécessaire à la pousse est fourni essentiellement par les réserves contenues dans les racines et accumulées à la fin du cycle végétatif précédent. Ce n’est qu’à partir de la floraison que la vigne absorbe l’azote du sol de façon notable.
Absorption de l’azote par la vigne

Quels sont les outils d’aide à la décision ?

L’observation est actuellement l’outil le plus utile, le préalable indispensable pour déterminer la nutrition azotée de la vigne, par l’intermédiaire de l’évaluation de la vigueur. Le nombre de rognages, le développement de la pourriture grise, la couleur des feuilles, la grosseur des sarments, le niveau d’entassement du feuillage, l’importance des entre-coeurs peuvent être des indicateurs de la vigueur de la parcelle. Sauf cas de carence, la quantification et l’interprétation sont toutefois rendues délicates par le caractère subjectif de cette évaluation. Il est donc nécessaire de réaliser des mesures pour en avoir une idée objective : diamètre du sarment, poids moyen du sarment ou poids des pétioles. Ces mesures sont simples mais difficiles à systématiser. De plus, elles nécessitent des référentiels régionaux. Les autres outils à la disposition du viticulteur viennent en complément : analyse foliaire, analyse de terre (taux de matière organique et C/N), mesure de l’indice chlorophyllien.

Quels sont les éléments à prendre en compte ?

La gestion de la fertilisation azotée doit également se raisonner à partir des éléments suivants :

  • entretien du sol. L’enherbement va concurrencer la vigne au niveau des prélèvements d’azote. Le travail du sol a tendance à accélérer la minéralisation de la matière organique et donc la libéralisation d’azote par le sol, en augmentant l’aération et en rendant les matières organiques plus accessibles à la biodégradation
  • sol par l’analyse de terre pour le K2 (coefficient de minéralisation : taux de matière organique dégradée annuellement) et la profondeur exploitée par les racines (idée du volume de sol exploré par la vigne)
  • sensibilité à la pourriture grise : éviter les apports d’azote dans les parcelles sensibles
  • apports d’amendements organiques : les amendements organiques contiennent plus ou moins d’azote. il convient d’en tenir compte dans le raisonnement. Par exemple, un fumier de bovins frais contient en moyenne 5 kg d’azote par tonne de produit brut. A la dose de 30 tonnes par hectare, il apporte donc 150 unités à l’hectare. Même si cet azote est libéré progressivement, l’apport est loin d’être négligeable. La forme de la matière organique apportée est également à prendre en compte. Ainsi, un amendement ligneux bien composté, libérera très peu d’azote chaque année.

Azote et moûts ?

Les analyses d’azote sur moût (ammoniacal, assimilable ou total) donne une bonne idée de la fermentescibilité des moûts. Toutefois, la relation entre ces teneurs et la nutrition azotée de la vigne n’est pas toujours établie, les conditions du millésime pouvant jouer de façon importante sur le niveau d’azote des moûts (climat, rendement, maturité). De plus, il existe un découplage entre azote des moûts et azote du végétal. L’azote des feuilles est le résultat de l’absorption et de la croissance de la plante durant la première partie du cycle végétatif. L’azote des baies est principalement le résultat de l’absorption d’azote durant les phases estivales. Ces analyses ne présagent donc en rien de l’alimentation azotée de l’ensemble de la plante. L’apport d’azote par voie foliaire est intéressant pour augmenter la teneur en azote des moûts, ainsi que la composante fruitée de certains vins, en condition de carence azotée des moûts. Une fiche sur l’azote ammoniacal du moût est disponible.