L’IFV accompagne les ODG dans le choix des variétés patrimoniales, exemple en Val de Loire 

Dans le cadre de la règlementation VIFA de l’INAO, les AOP ont désormais la possibilité d’expérimenter des variétés et cépages qui ne figurent pas dans les cahiers des charges, ceci dans un cadre rigoureux. Les variétés expérimentées ne doivent pas excéder 5 % de l’encépagement d’une exploitation et 10% de l’assemblage d’une cuvée. Reste à choisir les variétés à expérimenter parmi cépages et variétés résistantes. 

En Val de Loire, les Organismes de Défense et de Gestion (ODG) de Touraine et d’Anjou-Saumur ont engagé une réflexion stratégique sur l’introduction des variétés adaptées aux défis viticoles actuels (changement climatique et environnementaux) tout en valorisant et préservant leur terroir. Dans cette démarche, ils étaient accompagnés par l’expertise matériel végétal de l’IFV. 

Une méthode rigoureuse de sélection des cépages VIFA
Les ODG ont défini un cahier des charges précis, fondé sur des critères techniques, agronomiques et œnologiques. À partir de ces critères, les équipes en charge du projet ont établi un tableau comparatif, intégrant un système de notation et de codage couleur. Ce tableau permet de visualiser rapidement les atouts et limites de chaque cépage et variété candidat, en les comparant aux cépages déjà présents dans l’appellation pour permettre aux représentants des appellations, de réaliser le choix qui leur incombe. 

Trois grands types de cépages/variétés se sont dégagés : 

• Les variétés résistantes, pour répondre aux enjeux sociétaux de réduction des intrants ; 

• Les cépages méridionaux, en raison de la remontée des climats vers le nord ; 

• Les cépages patrimoniaux, en lien avec leur origine historique de la grande Vallée de la Loire. 

Les cépages étrangers ont été écartés en raison de contraintes liées à la disponibilité du matériel végétal et à la qualité sanitaire des plants. 

Des choix guidés par l’expérimentation terrain et l’évaluation sensorielle
Les données mobilisées dans le tableau proviennent à la fois de la bibliographie spécialisée (notamment via PlantGrape) et des résultats expérimentaux obtenus sur le domaine de Montreuil-Bellay. Les cépages/variétés ont été évalués à travers leurs caractéristiques phénologiques, agronomiques et œnologiques agrégées depuis plusieurs années. Les données incluent plusieurs années de micro-vinifications, testées en dégustation par les professionnels sur différents profils de vin : effervescents, tranquilles secs et tranquilles tendres. 

Zoom sur trois cépages patrimoniaux choisis pour leur polyvalence 

Touraine : Meslier Saint-François B
Issu du croisement entre le Chenin B et le Gouais B, ce cépage originaire de l’ouest de la France est un gros producteur. Il donne des vins neutres, faiblement alcoolisés, acides, et peut être vinifié en effervescent, ou en tranquille si son rendement est maitrisé.  

Anjou-Saumur : Gascon N et Gouget N
Deux cépages rouges polyvalents ont été retenus : 

• Le Gascon N, probablement originaire du Nord de la France, de parenté inconnue, il était  historiquement cultivé dans le Loiret et l’Yonne avant le phylloxera (jusqu’à 9 000 ha). Il est apprécié pour ses vins fruités, frais, moyennement alcoolisés et bien colorés. 

• Le Gouget N, originaire probable de l’Allier, il serait un descendant du Gouais B. Il donne des vins très acides, peu colorés et peu tanniques. Il présente un bon potentiel de production, même après des gelées printanières. 

Des cépages oubliés réévalués à l’aune du changement climatique
Délaissés après la crise phylloxérique, probablement pour leur maturité tardive, leur acidité élevée et leur extrême sensibilité à la pourriture grise, ces trois cépages pourraient aujourd’hui répondre aux nouveaux équilibres recherchés par les appellations ligériennes pour s’adapter au changement climatique. Intégrés au dispositif VIFA, ils seront testés pendant 10 ans, avec l’ambition d’entrer dans les cahiers des charges en tant que cépages accessoires. 

Mais les ODG voient plus loin : si les résultats sont concluants, ces cépages pourraient, à l’horizon 2050, redevenir des cépages principaux dans une Loire viticole adaptée à son temps.