Le projet BEE « Biocontrôle et Equilibre de l’Ecosystème vigne », porté par l’IFV Nouvelle-Aquitaine, propose de développer une démarche agro-écologique de la culture de la vigne afin de faciliter l’intégration des produits de biocontrôle. Le projet dispose de plusieurs sites en France : Juillac le Coq (16), Saint-Estèphe (33), Chinon (37), Wintzenheim (68) et Nîmes (30).
Les résultats attendus sont une réduction drastique de l’IFT hors biocontrôle et un respect des objectifs de rendement et de qualité pour les vins et eaux de vie. Le projet se déroule sur une période de 6 années entre 2018 et 2023 afin d’évaluer les résultats agronomiques, œnologiques et économiques sous la forme d’une trajectoire.
Dispositif expérimental
La méthodologie mise en œuvre est une expérimentation système. L’objectif de ce type d’essai est de mettre en œuvre, évaluer en grandeur réelle et améliorer des prototypes d’itinéraire de production. Le dispositif expérimental compare deux modalités : une référence (REF) et le système BEE. Elles sont composées de rangs entiers et constituent des bandes avec 3 répétitions à Juillac le Coq et 6 répétitions à Saint-Estèphe. La largeur des bandes est de 7 à 10 rangs. Cette largeur permet l’emploi de tous les équipements utilisés sur les propriétés viticoles.
Stratégie testée
Notre stratégie propose de remettre la plante au cœur du système. Elle s’appuie sur la gestion du sol et la prophylaxie. La vigne doit avant toute application de produits phytopharmaceutiques fournir les ressources nécessaires à sa défense et proposer un microclimat défavorable à l’installation et au développement des bio agresseurs. Les bio agresseurs doivent faire le moins de dégâts possibles lorsqu’ils sont en contact avec la vigne !
L’utilisation complémentaire de produits phytopharmaceutiques permettant une protection du végétal est inévitable. Les produits stimulateurs des défenses des plantes (SDP) sont positionnés préventivement pour préparer la plante à résister aux bio-agressions (matières actives : COS OGA, Cerevisane, divers phosphonates). Nous mobilisons également des produits avec une action asséchante (Matières actives : Huile d’orange douce et Hydrogénocarbonate de potassium) pour freiner leur développement. En dernier recours, pour des pressions sanitaires fongiques élevées, une application de cuivre ou de soufre à dose réduite sera possible. Les choix stratégiques s’appuient sur des observations simples, les données Météo France et le modèle Potentiel Système.
Dans le cas d’altération liée aux bio agresseurs, des itinéraires œnologiques correctifs sont prévus afin obtenir le profil produit souhaité.
Résultats des essais
Nombre de traitements et IFT : La modalité BEE nécessite un nombre de traitements équivalent à la modalité REF (Figure 1). La substitution des produits hors biocontrôle entraine une augmentation très importante de l’IFT biocontrôle (Figure 2). En effet, d’une part les produits de biocontrôle sont utilisés à la dose homologuée et d’autre part, il est nécessaire de cumuler différents modes d’action pour sécuriser la protection de la vigne. Nos règles de décision ont permis de réduire de 70% l’IFT hors-biocontrôle sans diminuer l’IFT Total.
Figure 1 |
Figure 2 |
Gestion des maladies et rendement : Dans nos témoins non traités, les pertes de récolte sont de 80 à 100% en 2018 et 2020. En 2018, notre stratégie présentait des dégâts modérés à Juillac le Coq et forts à Saint-Estèphe. Des enseignements ont été acquis depuis et les résultats 2020 montrent une bonne maitrise des bio agresseurs. Sur une pression faible à moyenne (Millésime 2019), nous constatons une absence de dégâts sur le système BEE est un rendement équivalent à la référence.
La protection des grappes contre le mildiou et le black rot nécessite l’utilisation de cuivre avec un apport moyen de 3 Kg de cuivre métal/ha depuis le début du projet. L’utilisation du soufre à la floraison et du cuivre contre le back rot donne partiellement satisfaction puisque la présence d’inoculum augmente dans nos parcelles depuis 2018. Les solutions de biocontrôle utilisées ne semblent pas avoir une efficacité sur le black rot.
Ce qu’il faut retenir
Entre 2018 et 2020, la stratégie BEE a permis une réduction quantitative de l’IFT hors-biocontrôle supérieure à 70% sans augmenter le nombre de passages. Elle s’est également affranchie de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques CMR. La mise en place de la stratégie BEE s’est accompagnée d’une baisse du rendement moyen de 20-30% par rapport à la référence. Cette baisse s’explique d’une part par les changements de pratiques engagés (absence de fertilisation, travail du sol…) et d’autre part par des dégâts de mildiou en 2018.
Article rédigé par Xavier Burgun et Nicolas Aveline du Pôle IFV Nouvelle Aquitaine.
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